13/05/2006

La ville du péché


Sin City est violent, c’est un fait. Mais il est idéaliste. La femme idéalisée en tant que p*** est montrée comme victime de la violence et de la bêtise masculine mais elle est bien capable d’être méchante et bête, elle aussi, comme par exemple cette gourde qui vend toutes ses amies pour se retrouver elle-même à la merci d’un psychopathe. La scène qui clôt la fin du film est drôle parce qu’elle empêche de tomber dans le schéma femme victime/gentille et homme bourreau/méchant; la scène de clôture donc évite d’irriter les hommes se sentant obligés de penser du « bien » de la pauvre Femme.

Il n’y a rien à redire sur l’esthétique du film qui fait très bien passer la pilule de la violence au point que les censeurs éberlués sans doute, par la beauté visuelle, se sont dit, comme il y a deux cent ans (je renvoie pour les amateurs d’histoire, à Victor Cousin) : « ah! laissons la morale de côté ça n’a rien à voir avec l’art ». Donc pas de censure. Ceci dit, je ne pense pas que la morale du film soit inexistante. Elle vous prévient de la brutalité de l’Homme de façon générale, surtout lorsque l’homme est un psychopathe et qu’il obéit aveuglement à la Religion (on n’a pas encore écrasé l’infâme!). Le mal n’est pas inhérent à l’homme, il vient de l’institution (les flics sont pourris, sauf Hartagan), de l’Eglise (le psychopathe campé par Elijah Wood a été recueilli et engagé charitablement par le cardinal). Marv qui aime bien torturer les gens est philosophe et capable d’aimer une femme (Goldie). Comme s'il y avait du mérite à aimer les gens, sexuellement parlant. Bien sûr, without sin, there’s no justice, mais qu’est ce que la justice ? Il reste à la définir.

En résumé, à mon avis c’est un très beau film: visuellement révolutionnaire mais, en ce qu'il participe de l'idéologie anti-chrétienne à fond les ballons (parce que c'est toujours plus facile de taper sur le crâne des vieilles institutions qui ne veulent pas mourir), il ne brasse que du vent, même si le vent souffle très fort. En fait dans le fond, c'est exactement le même genre de film que Seven! or, sans inversion des valeurs pas de provoc', et sans provoc' pas de succès gigantesque. Ce que ce film fait de mieux c'est qu'il lie le fond à la forme!

07/05/2006

Scarface : l'art de jeter ses fautes à la face des autres lascars


Un dérivé de films de gangster des années 50, version toxico en 83. De la même façon que Tony Montana a pris fictivement exemple sur Boggart, Tony Montana servira de modèle réel, et sert toujours de modèle, à une cetaine catégorie de jeunes. L'irrésistible ascension du caïd, bien que se terminant de façon tragique (pour lui) se calque sur l'idéologie selon laquelle ce n'est pas la faute des meurtriers s'ils tuent. D'une certaine manière, il est vrai que ce n'est de la faute de personne puisque Tony invite ses disciples à l'imiter, en avouant lui même qu'il doit son attitude et sa façon de parler, insolentes, à un autre que lui, à Humphrey Boggart, aux films hollywoodiens: il ne pouvait pas résister au "rêve américain," en tant que portoricain vivant sous le régime castriste.
Une fois que Tony parvient selon ses propres termes, à enlever ses mains de la m**** parce qu'elles "sont faites pour l'or", c.à.d. à se défaire de son job de cuistot pour celui de dealer, après moultes altercations et réglements de comptes avec un boss gênant (ah ! la scène où il trucide Frank sur fond de musique de film d'horreur...et où il a ce mot, terrible "je suis parano"!!), après tout cela, il parvient au sommet, au "power", lui qui ne veut rien moins que le monde. Le sommet pour lui c'est l'argent. Une fois qu'il a le pouvoir il dégote la femme de ses rêves (la belle Pfeiffer), qui est accessoirement la femme de son patron. Seulement, et c'est là le thème de sa chute, il est trop honnête. S'il vend de la coke à toutes les capitales de l'Etat uni, il ne poignarde personne dans le dos, lui! C'est sa bonté même qui le perd. Les bêtises, c'est par amour qu'il les fait. Elvira sniffe lors de leur première sortie, il l'imite, et l'on se souvient qu'il finit le nez dans la farine dans son palais de plastique. Il change de voiture, parce qu'Elvira (qu'il veut alors conquérir) ne veut pas monter dans sa vieille cadillac (qu'il rêvait d'avoir alors il n'était pas encore au sommet). Il rompt avec son patron à cause d'elle (parce qu'il lui fallait plus d'argent pour pouvoir sortir avec elle), et c'est à cause d'elle qu'il le tue, puisque la scène d'après le meurtre nous le montre en train de réveiller Elvira dans ses draps de satin. Ah, la, la.
Ce n'est donc pas la faute de Montana. Pas la faute de Montana s'il est c*** et s'il finit shooté. La faute aux films, la faute aux femmes. Comme dans la vie, évidemment!