25/08/2006

Usure de la critique journalistique [Spoilers]

Affiche du film: Lady in the Water

Consternée par la bêtise répétitive de critiques soi-disant professionnels semblant n'être payés que pour regarder une bande-annonce, il m'a semblé être de mon devoir de commenter cet article découpé dans un torchon fameux, et dont le lien est ici.

Le papier en question est de la plume de Philippe Azoury, une critique du dernier film de Shyamalan Lady in the Water, critique dégouttante de mauvaise foi et représentative, j'espère bien le montrer, de la médiocrité d'une intelligentsia qui ne vit que de se regarder dans le miroir.

Le visionnement du film permet de comprendre, voire de compatir à ces aberrations journalistiques. Le journaliste Philippe Azoury tient le rôle qu’on lui assigne et tombe dans le piège que Shyamalan lui tend, à lui et ses congénères (car, s'étant ligués contre le film à cause du portrait d'un critique de cinéma, ils rejouent le rôle d'une caste une fois honnie mais plus noble qu'eux). Résumons les causes du conflit: critiquant un critique cinématographique, le réalisateur ne pouvait s'attirer que... la critique. N'est-ce pas voulu de la part de Shyamalan (pervers!) ?

P. Azoury, persuadé, à l’image du critique du film, que tout ce qu’il sait et croit savoir sur le monde du cinéma sera tel qu’il le dira, que peut-il faire d’autre que retomber sur ses pattes et déplorer, à l’instar de ses congénères, le manque d’originalité des œuvres contemporaines ?... Cette critique est, comme tant d’autres, attendue... comme si elle était programmée, par deux évènements interplanétaires: Shyamalan sort un nouveau film et Shymalan critique les journalistes de cinéma.

Il ressort de toute cette réflexion une grande tristesse du critique. Il n'est pas de plus grande méchanceté que dire à quelqu'un qu'il est triste, n'est-ce pas?

Shyamalan et l'acteur P. Giamatti

Pour nous parler du film, P. Azoury commence, avec une fausse bienveillance, à nous parler de "l'année difficile" de Shyamalan. Le journaliste aime jouer des doubles allusions. Shyamalan est qualifié, pour ouvrir l'article, d’ « Ex-petit Jésus d'Hollywood » et, plus loin, de « cinéaste messianique ». Favorisé, il aurait donc été chéri des dieux tout puissants incarnés par Disney, généreux mécène indifférent à la nullité de son artiste. Mais le revers de cet attribut "Petit Jésus" fait bénéficier Shyamalan d’une aura douteuse, puisqu'il est en opposition idéologique avec le journal duquel le journaliste est à la solde (LIBé!). Ce côté messianique, quant à lui, ne saurait s’appliquer intégralement à Shyamalan, car ce dernier a le toupet de dénoncer le journaliste et les siens, eux, dont la mission est d’être les messies de l’information.

Le journaliste accuse ensuite Shyamalan d’un tort plus grave : « Ne décolérant plus [il] a dénoncé dans un livre ses différents [sic] avec la compagnie aux oreilles décollées ». On est censé comprendre qu’il s’agit de Disney, et l’esprit du lecteur doit constater la perfide allusion de cet esprit retors. Si cette attaque reste implicite, c’est que Shyamalan n’a jamais émis de critiques de ce genre, et que c’est bien l’amalgame chrétien donc antisémite, qui fait dire à ce garçon de telles inepties.

Après ce portrait caricatural, il passe à la critique construite du film, peu élaborée, peu justifiée, on va le voir. Des considérations sur la campagne promotionnelle et les succès de Shyamalan sont les critères excellents que retient le cinéphile afin d'inciter ses lecteurs à bouder les séances. «On peut s’amuser de l’embarras visible d’une campagne promo essayant de tirer l’affaire vers la dérision ». Comment peut-il feindre avec mauvaise foi être un spectateur naïf, exempt de toute considération à ce sujet ? C’est une erreur déontologique de la part du critique cinématographique qui, de prétendu neuneu, se mue soudainement en parangon du connaisseur littéraire quelques lignes plus bas: il reproche à ce film des « signes évidents d’usure narrative». De culture, il ne manque certes pas :

« [Ceux qui n’aiment pas Shyamalan] qui, depuis Incassable ou le Village, soupçonnaient quoi qu'il en soit Shyamalan d'être juste capable de filmer des blagues Carambar avec le sérieux existentiel du Bergman du Septième Sceau n'auront plus aucun doute ».


Le critique englobe toute sa caste agonisant sous le fléau de la pénurie intellectuelle avec le « Ceux » : ceux, eux, les élus, l’élite qui a Vu, de ses yeux Vu, de quel sinistre personnage il s’agissait, de quelle honteuse idéologie Shyamalan était porteur. La culture devient accessoire au profit de la Dénonciation du Comité de salut public & de la propagande idéologique. Bien malgré elle, cette insulte reconnaît une cohérence à l’œuvre de M. Knight. La culture de P. Azory ne s’arrête pas là. Peut-être en a-t-il trop, peut-être en a-t-il tant qu'il perd le fil du réel? A l'aide de sa référence philosophique, il érige celle-ci en condition sine qua non de tout chef-d’œuvre, accusant à plusieurs reprises Shyamalan de procéder par « rétrécissement ». Il serait naturel, suivant sa logique, que l’on exige du cinéma de comporter les dialogues de Rohmer et le suspens d’Hitchcock... Il est certain que l'on va au cinéma parce qu'on a égaré nos livres de philosophie et que l'on veut les retrouver à l'écran.

Shyamalan

Pour mieux ridiculiser Shyamalan, Azoury décide ensuite de déconsidérer les « fan » classiques de ses films (car il y en a). Il décide de les peindre galamment en attardés profonds. Tout comme le critique fictif du film qui meurt pour avoir préjugé des intentions d’autrui, Azoury arrive, avec une prescience divinatoire, à prévoir que les fans de Shyamalan vont s’ennuyer face à la toile et que, dans leur bêtise naturelle, ils appliqueront au symbolisme du film l'interprétation que la classe médiatique a elle-même appliqué au « Village ». Je le cite : "Par fidélité, [les fans] verront dans ce dégorgement de symbolisme le premier film sur les inondations en Louisiane". Cette fureur de bêtise vient sans doute de ce que la scène où le critique prévoit la façon "cinématographique" dont il va mourir est une des scènes les plus drôles du film. Le personnage de critique du film est un critique tellement engoncé dans ses références cinématographiques qu'il ne voit plus le réel, qu'il en meurt.

Mais ce qui est à retenir, à travers l’attaque des spectateurs, ce n’est pas tant le manque supposé de capacités intellectuelles de ces derniers, qu’un indice des facultés imaginatives déficientes du critique.

Pour conclure sur ce brillant tissu de prose (on doit reconnaître ce talent à l'auteur), je dirais que ses mérites consistent principalement à : savoir jouer avec l’allusion ambigüe, la calomnie. Donnez-moi quelqu'un à haïr, je vous aimerai. Shyamalan croit en Dieu. Certes, on a le droit de trouver les films de Shyamalan puants, nuls, lents, la liste est longue... Mais faire l'éloge du talent et de l'émotion, des valeurs de l'entraide et de la foi, c'est être passible du boycott journalistique. A défaut d'être efficace et fondée, ce genre d'attaque finit par tourner à l'attaque personnelle. La croyance personnelle du cinéaste tourne ainsi à la psychose sous la plume d'Azoury: Shyamalan est décrit comme étant "plus parano que jamais".

Voilà ce que le film et ce critique montrent bien: sans imagination, pas de création et pas d’espoir! penser que tous les hommes se valent, que tous les films doivent se valoir, bref, dire ce que l'art devrait être et faire la morale au réalisateur, n’est-ce pas se dénoncer soi-même comme ignare ? Philippe Azoury en est un, et un très grand.



3 commentaires:

Anonyme a dit…

dans ce film, le journaliste est vraiment pas sympathique du tout non on ne comprends pas forcement pourquoi le real le met dans l'histoire...jusqu'à la fameuse scene où il donne un sens precis à tout: en fait tout peut se passer comme il le dit (il a raison sur lui, sur son statut) mais rien ne se passe comme il le dit ou le voudrais, parce qu'il mise tout sur la raison. c ça le mess du real. apres on peux dire que c orienté, bah forcement il prend position, seulement on l'attend toujours au tournant, il a le droit de parler.
voilà. bonne journée.

Anonyme a dit…

Wouah ! ce débilos n'osera plus parler de shyamalan après une critique si cinglante ! Bravo néodyme35.

Anonyme a dit…

je n'ai pas compris grand chose.