02/08/2014

"Les Horreurs de la démocratie", de Nicolas Gomez Davila


Amis lecteurs,



Après une pause, le blog digressif renaît de ses cendres... 
 Il se joint à moi pour vous souhaiter la bienvenue sur ses pages, et vous promet d'être de nouveau actif !
Pour égayer vos lectures estivales, je ne vois rien de mieux que de vous entretenir d'un auteur merveilleux.




Bogota (Colombie), ville de naissance de Gomez Davila. 

Il est difficile de présenter le Colombien Nicolas Gomez Davila (1913-1994), sans préciser que cet homme n’était pas un écrivain de profession, mais un grand bourgeois qui, du fait d’une légère infirmité, resta cloîtré en sa demeure sa vie durant, se passionna pour la littérature française et les cathédrales, et lut tout ce que contenait son immense bibliothèque. Catholique fervent, il est l’héritier d’un La Rochefoucauld pour la forme, de Pascal pour la profondeur de la pensée, de Rousseau pour le goût du paradoxe, et de Nietzsche, pour sa fascination des « forts ».

Nicolas Gomez Davila


Contempteur du progressisme sous toutes ses formes (politique, religieuse, littéraire), il enchante notre esprit par des phrases brèves et concises, suivant en cela le précepte de Boileau : « Ce qui se conçoit bien s’énonce clairement ». Cette brièveté, souvent déconcertante, Gomez Davila s’en justifie ainsi: « L’écrivain bien élevé s’efforce d’être clair. Mais (...) expliquer plutôt que suggérer suppose un certain mépris du lecteur ».



Gomez Davila nous fait donc l’honneur de nous croire intelligents et nous entraîne, pour peu que l’on veuille bien le suivre, dans ses réflexions fulgurantes.


Pour vouloir le suivre, comprenons bien l'un des postulats de sa pensée  : « Être réactionnaire, c'est comprendre que l'homme est un problème sans solution humaine ». Par « solution humaine » il pense à la Révolution française, aux droits de l'homme, au socialisme et à l’humanitarisme de Vatican II. Si la « solution » n'est pas humaine, elle est donc divine- le paradis terrestre n'existe évidemment plus, il n'existera dans aucune utopie ni aucun socialisme. On reconnaît  là une pensée authentiquement catholique, reléguant le paradis à une existence future (après la mort) et cantonnant la vie terrestre à l'acceptation de la souffrance. Au débarras le Progrès donc. En attendant, la solution en sursis du paradis consiste en un catholicisme enraciné, dans lequel le triangle bourg, château, monastère, ne serait pas seulement une "miniature médiévale", mais « un paradigme éternel ».



Pour sa publicité, la quatrième de couverture des Horreurs de la démocratie, l’éditeur n’a rien trouvé de mieux à écrire que: 



« Gabriel Garcia Marquez (1) aurait avoué en privé : « Si je n’étais pas communiste, je penserais en tout et pour tout comme lui ».







La puissance de Gomez Davila, comme tout véritable écrivain « moderne », réside dans la condamnation tout entière de la « modernité » et de ses monstres. Sa vision du monde est un peu celle d’un moine médiéval, transplanté dans un espace-temps hostile, tel Ignatius Reilly, anti-héros de la formidable Conjuration des imbéciles –le ridicule en moins, bien entendu.

  


Je vous laisse donc découvrir cet écrivain par quelques extraits choisis, tirés des « Horreurs de la démocratie », dont le titre à lui seul est tout un programme. 







Notre ultime espérance repose en l’injustice de Dieu.


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Le psychologue hante les bas quartiers de l’âme, comme le sociologue les banlieues de la société.


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Ceux qui excusent leur abjection en se prétendant « victimes des circonstances » sont des socialistes doctrinaires.

Le socialisme est la philosophie de la culpabilité des autres.


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Se refuser à admirer, c’est le signe de la bête.


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La religion n’est pas née d’un besoin urgent d’assurer la solidarité sociale, pas plus que les cathédrales n’ont été construites dans le dessein de favoriser le tourisme.





 la cathédrale de Milan


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Une lutte contre l’injustice qui ne débouche pas sur la sainteté débouche sur des convulsions sanglantes.



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La littérature française classique prouve que l’homme n’a pas besoin de s’aveugler pour être grand.



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Éduquer l’homme, c'est empêcher la « libre expression de sa personnalité ».


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L’homme ne crée pas ses dieux à son image et à sa ressemblance, mais il se conçoit à l’image et à la ressemblance des dieux en lesquels il croit.



Murillo, Saint François


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L’historien démocratique enseigne que le démocrate ne tue que parce que ses victimes l’obligent à les tuer.




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Tout individu susceptible de déplaire à l’intellectuel de gauche mérite la mort.

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Le communisme hait le capitalisme par complexe d’Œdipe.

Le réactionnaire, lui, ne fait que le considérer d’un œil xénophobe.



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A Barad-Dur, l'oeil de Sauron (Tolkien, Le Seigneur des Anneaux, adapté par P. Jackson)





Le mal, comme l’œil, ne se voit pas lui-même.

Qu’il tremble, celui qui se voit innocent.




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La foi, c’est ce qui nous permet de nous égarer dans n’importe quelle idée, sans perdre de vue le chemin du retour.



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L’orgueil nous suffit pour pardonner à qui nous injurie, mais la charité elle-même n’est pas suffisante pour que nous pardonnions à qui injurie ceux que nous aimons.


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Quand les convoitises individuelles se rassemblent, nous avons pris l’habitude de les appeler nobles aspirations populaires.




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Un lexique de dix mots suffit au marxiste pour expliquer l’histoire.



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Le gauchiste hurle à la mort de la liberté quand ses victimes refusent de financer leur propre assassinat.



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Pour juger notre époque, il suffit de se rappeler que ses moralistes sont les sociologues.



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Le dialogue entre communistes et catholiques est devenu possible depuis que les communistes falsifient Marx et les catholiques le Christ.



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L’homme ne possède pas son intelligence : son intelligence est en visite chez lui.


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La vénération de l’humanité est répugnante, comme tout culte de soi-même.


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Beaucoup n’aiment l’homme que pour oublier Dieu la conscience tranquille.

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Les opinions stupides cessent de nous irriter si nous les prenons comme des documents sur la personne qui les exprime.



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Le chrétien moderne ne demande pas à Dieu de lui pardonner, mais d’admettre que le péché n’existe pas.


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Le christianisme scandaliserait le chrétien, s’il cessait de scandaliser le monde.


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Il est facile de sympathiser avec n’importe quel homme, tant qu’il n’émet pas d’opinion.



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Le peuple n’envahit que des palais déjà désertés.

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« Avoir le courage de s’accepter » est l’une des nombreuses formules modernes qui tâchent à occulter la bassesse de l’homme en appelant difficile ce qui est facile.

L’esprit moderne affirme que rien ne demande plus d’efforts à l’homme que de céder à son animalité.



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Les prises de position révolutionnaires de la jeunesse moderne sont des preuves irréfutables de ses aptitudes à la carrière administrative.

Les révolutions sont de parfaites couveuses à bureaucrates.



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Celui qui écrit raison avec une majuscule s’apprête à nous duper.


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Ce que l’écrivain invente tout d’abord, c’est le personnage qui va écrire ses œuvres.



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Seul le sociologue qui n’a pas de message à délivrer ne dit pas toujours que des bêtises. 

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Si grande est la distance entre Dieu et l’intelligence humaine que seule une théologie pour enfant n’est pas infantile.



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La féodalité a été fondée sur des sentiments nobles : loyauté, protection, service.

Les autres systèmes politiques se fondent sur des sentiments méprisables : égoïsme, convoitise, jalousie, lâcheté.


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La charité, pour un égalitariste, est un vice féodal.


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Le christianisme n’a pas inventé la notion de péché, mais celle de pardon.



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Le catholique progressiste va ramasser sa théologie dans la poubelle de la théologie protestante.




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Les concessions sont les marches de l’échafaud.




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Cette libération de l’humanité qu’a tant chantée le XIXe siècle s’est finalement résumée au tourisme international.

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Le Progrès se réduit finalement à voler à l’homme ce qui l’ennoblit, pour pouvoir lui vendre au rabais ce qui l’avilit.


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On appelle communiste celui qui lutte pour que l’État lui assure une existence bourgeoise. 

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Nous appelons ère libérale les quatre siècles que prit la liquidation des libertés médiévales.


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(1) Gabriel Garcia Marquez est un écrivain réputé pour ses opinions marquées à gauche, auteur notamment du roman L'Amour au temps du choléra.




3 commentaires:

Anonyme a dit…

Pas mal pas mal.

Cependant je n'ai pas tout compris :)

Max

leon a dit…

Comment se fait il que cet auteur soit inconnu en Belgique ?
Heureusement que vous êtes la, chère Neodyme, grâce à vous je ne mourrai pas idiot: je vais acheter son livre.... mais attention: pas plus d'une phrase par jour: le temps nécessaire pour la comprendre !

Au plaisir de découvrir vos billets

Anonyme a dit…

Excellent site, ravi que vous repreniez du service